Sujet: Quand le héros sauve la mauvaise Princesse Mer 29 Juin - 19:29
Caleb avait fini tôt aujourd'hui ; il avait eu des affaires à régler en dehors de la ville et venait juste de rentrer à Achaea. Or, à peine sortait-il de sa voiture que son portable sonna. La mélodie, simple et sans fioritures, résonna dans la rue. Le jeune avocat regarda son appartement avec envie, puis décrocha avec un soupçon d'agacement, qui se ternit aussitôt en entendant la voix de la secrétaire du président du conseil juridique de la ville.
« Monsieur Button ? Ici Fiona Langcaster, secrétaire juridique. L'affaire sur laquelle vous êtes, il y a du nouveau. Nous avons reçu un appel anonyme vous donnant rendez-vous ce soir, dans un bar en ville. Le Nomingway. Je tenais juste à vous informer » déclara t-elle poliment, puis elle raccrocha après avoir entendu la réponse plaintive de Caleb.
L'avocat avait pensé pouvoir passer une soirée tranquille ; pour une fois il n'avait pas une pile de dossiers à éplucher. Il avait bien un cas, en ce moment, mais rien qui ne nécessitait qu'il y passa la nuit, comme certains. Il avait cru pouvoir profiter d'une bonne nuit de sommeil, d'une bonne douche et d'un repas chaud - pas forcément dans cet ordre là.
* Râpé * pensa t-il, avec un brin d'ironie.
Il prit cependant le temps de passer chez lui pour se changer : apparemment la personne qui voulait le tenir informé le connaissait. Comment ? Aucune idée. Caleb songea bien un instant à un rendez-vous factice : et si c'était un traquenard ? Un piège, d'un groupe anti-mutant ? D'Apocalypto ? Il frissonna ; il n'était pas reconnu comme mutant. Il ne pouvait pas être victime d'un acte de violence raciste. Tout en retirant sa veste et en desserrant sa cravate, il eut honte d'avoir peur. Les siens, ceux qui étaient recensés, avaient peur aussi ; ils avaient raison. Il était marqué dans la loi que chaque humain portant en lui devait être reconnu et pucé ; ce n'était pas son cas. Un avocat qui était un hors-la-loi ! Quelle blague.
Il alla prendre une douche ; en se sentant propre, il se sentit mieux. Plus calme, plus reposé. Il s'assit et se prépara une infusion d'herbes - il détestait les médicaments et cela faisait plusieurs années qu'il préparait lui-même ses remèdes à base de plantes. Le jeune homme massa du bout des doigts ses tempes où une migraine palpitait douloureusement. Il but sa tisane à petit coups, comme un enfant. Il était encore tôt pour sortir ; il avait bien le temps de se reposer. Il se promit de sortir vers 19h30, histoire d'attendre là-bas son témoin surprise. Il doutait cependant que cet inconnu vienne réellement. C'était soit une blague soit un piège. Au mieux, un vrai témoin qui lui servirait. Caleb alluma la télé qu'il regarda distraitement en sortant la pile de paperasses de sa mallette noire ; il se mit à faire le tri dans les papiers, et l'heure passa plus vite qu'il ne l'avait prévu. Il se retrouva à faire des marques dans les marges, et à griffonner des idées d'arguments, alors qu'il avait juste voulu ranger. Entre amusement et exaspération contre son côté minutieux, il se redressa et s'étira dans un craquement de son dos ; ses muscles se relâchèrent brusquement, et il sentit une légère brûlure dans ses membres, qui passa très vite.
Il regarda sa montre et commença à se préparer : il mit une tenue plus décontracté, qui lui permettrait d'être plus à l'aise. Il hésita un moment, ayant peur qu'on ne le reconnaisse pas ; l'idée lui plût soudain. Il n'était pas encore connu au point qu'on se retourne sur lui dans la rue mais il avait participé à une affaire il y avait peu sur le procès d'un mutant, et il était passé rapidement à la télévision. Il rit soudainement, devant son égo surdimensionné. Pour qui se prenait-il ? Il n'était pas une célébrité ; il choisit une chemise au ton violet, ajouta un veston noir et un jean simple ; un regard dans la glace le satisfit. Il se sentait bien ; la fatigue qui l'avait assaillit quelques heures auparavant n'était plus. Etait-il si heureux que cela de sortir ? Il était vrai que depuis sa rupture avec Carmen, il n'avait plus cherché de nouveaux centres d'amusement, ni de nouveaux amis. Il s'était juste concentré sur son rêve : devenir avocat. Mais à présent que ce rêve c'était réalisé, que lui restait-il à faire ?
Oui, l'idée de sortir le rendait heureux. Il conclut cela sur un sourire amusé ; il prit une veste de cuir noir, y rangea ses clés d'appartement, son portefeuille et son portable, puis fila. Il héla un taxi et donna au chauffeur l'adresse du bar ; le regard désapprobateur de l'homme lui fit froncer les sourcils.
« Mon bon monsieur, vous avez l'air bien sur vous ; c'est un endroit peu recommandable. Des voyous le fréquentent régulièrement, je ne réponds de rien en vous laissant là-bas. »
Par voyous, voulait-il dire mutants ? Le chauffeur dut surprendre son regard, car il secoua doucement la tête, avec une lueur de résignation. Il soupira et murmura :
« Si par voyous, je voulais dire mutants, c'est le terme que j'aurais employé. »
Et sur cette phrase, il remonta le carreau entre le côté chauffeur et passager, et démarra rapidement. Caleb, un peu confus par cette discussion étrange, sentit son angoisse réapparaître : il serait prudent, se promit-il. Il ne portait pas d'armes, il détestait cela ; il regretta un peu ses états d'âme, le temps de la route. Ils arrivèrent après une bonne dizaine de minutes ; en payant le chauffeur, Caleb voulut l'interroger, mais l'homme ignora ses questions et évita son regard, et repartit aussitôt son client débarqué. Caleb soupira et se retourna pour faire face à une devanture délabrée, dont les néons de toutes les couleurs clignotaient spasmodiquement, comme dans une agonie profonde et douloureuse. L'endroit donnait sur la rue, et pourtant, le jeune avocat se serait cru dans le fin fond d'une ruelle humide : ça sentait l'urine et le tabac à plein nez ; des gens formaient une masse compacte devant la porte et la devanture ; ils fumaient, parlaient fort, criaient et Caleb détourna les yeux de ce qu'il crut être une scène de pelotage fort osée. Les joues rosissantes, il pénétra dans le bar sous les regards furtifs des habitués ; il fallait dire qu'il n'avait pas vraiment le look : il n'y avait que la veste en cuir qui empêcha les videurs à la porte de ne pas le jeter dehors. Il fit un sourire hésitant, dévoilant ses dents d'un air un peu idiot ; il alla rapidement s'asseoir près d'une fenêtre et l'ouvrit pour respirer un peu d'air frais ; toussant ses poumons, il se demanda pourquoi il ne s'en allait pas directement. Il faisait sombre, ça puait encore pire que dehors, et parmi les ténèbres faiblement éclairés par des lampes aux lumières roses, il entrevit des choses que son statut d'avocat aurait pu juger devant un tribunal. Une serveuse s'approcha ; habillée de tule rouge, et uniquement de ce tissu très transparent, elle se pencha vers lui, lui dévoilant largement sa poitrine où se formaient des marques de suçons, et lui sourit. Il lui manquait deux dents de devant.
« Je te sers quoi, mon mignon ? » demanda t-elle d'une voix chaude, ersatz de ton sensuel, tout en le reluquant d'un air gourmand.
Caleb détourna les yeux, il avait beau être un homme, il était resté quelque peu enfant et prude, et il n'avait pas vu de femme nue depuis des mois. Il marmonna un « Whisky, s'il vous plaît » d'un ton qui se voulait ferme et qui était juste timide. La serveuse éclata d'un rire grave, et s'éloigna en dandinant de ses fesses nues sous le mince bandeau de tule qui l'enrubannait. La musique était forte ; Caleb n'aimait pas cela, il avait les tympans fragiles.
Il sourit en s'entendant penser : un vrai vieux ! Il grimaça, accepta d'un hochement de tête le verre qu'on vint lui déposer, et but une gorgée pour se détendre. Il espérait avoir l'air à l'aise, mais il n'avait tout juste pas l'air dans son élément. Il observait plusieurs hommes qui tournait autour d'une femme, qu'il apercevait difficilement derrière touts ces silhouettes massives et bardées de cuir ; il serra plus fort son verre. Il ne souhaitait pas être le témoin de violences ; il était prêt à agir si il le fallait. Userait-il de ses pouvoirs, si il le fallait ? Dilemme, auquel il réfléchit, les yeux posés sur la scène qui se déroulait à quelques mètres de lui près du bar ; il attendait de voir ce qui se passerait. De voir si la femme avait besoin de lui.
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Sujet: Re: Quand le héros sauve la mauvaise Princesse Sam 2 Juil - 5:17
Spoiler:
Je m'excuse d'avance si c'est très mauvais. Je n'ai pas d'excuse valable, par contre.
Le regard accroché à celui de son reflet brouillé dans le miroir – comprendre ici que c’est le miroir qui est brouillé par la saleté, et non le reflet directement – Meagan s’occupait de régler les derniers petits détails de son allure avant de sortir. Enfonçant une énième pince dans ses cheveux pour qu’ils tiennent en place, elle lorgna les deux perruques qu’elle avait sorties de sa chambre presque au hasard, sans idée particulière en tête de ce dont elle voulait avoir l’air ce soir. Le premier postiche était un long assemblage de cheveux noirs et lisses. Le second était fait de cheveux bruns foncés, longs et ondulés arrivant un peu en dessous de la poitrine. Avec son vieux t-shirt gris foncé et usé de Mickey Mouse et ses jeans, ça lui donnerait une allure tout à fait banale. Une fois l’appendice de cheveux fixé à son crâne, elle constata avec amusement que ça la rajeunissait. En fait, ça lui donnait son âge réel, alors qu’en temps normal elle faisait beaucoup plus vieille. Elle ne se donna pas la peine de retoucher son maquillage; il en restait quelques touches de la veille … ou alors c’était de l’avant-veille. Elle ne savait plus. Elle haussa les épaules, délaissa son reflet et quitta la minuscule salle de bain. Attrapant les lacets de ses Rangers au passage, elle alla jusqu’au salon où elle se laissa lourdement tomber sur le sofa, arrachant un sursaut à son frère. Elle lui prit des doigts la cigarette qui était sur le point de lui échapper, en tira une bouffé puis la lui remit entre les lèvres.
« Sérieux, quand j’vas rentrer et apprendre que l’appart a pris feu parce que tu t’es endormi une fois d’trop en fumant … »
Elle ne termina pas sa phrase. Son frère ne l’écoutait pas du tout. Il avait sursauté, certes, mais ça ne l’avait pas tiré de son sommeil proche du coma. Elle soupira, reprit la cigarette et en tira quelques bouffées avant de l’écraser sur la table. Non. Probablement qu’elle ne serait pas étonnée si elle trouvait l’appartement en feu à son retour. Déçue. Anéantie. Bouleversée. En colère. Mais pas étonnée. Se penchant en avant, elle entreprit d’enfiler ses bottes et de les lacer serré par-dessus les bas de son jeans. S’étirant, elle se remit debout et assena une bonne claque sur la cuisse de Kelley. Celui-ci ouvrit faiblement les yeux et marmonna quelque chose d’incompréhensible.
« J’sors, le gros. Tu veux que j’te ramène un truc ? »
Elle n’attendit pas la réponse, seulement le grognement qui voudrait dire qu’il était à nouveau endormi. Alors elle se dirigea vers le comptoir, fouilla dans le fourre-tout – une caisse de bière vide – qui traînait sur le comptoir pour trouver ses clés, quelques billets, quelques capotes et tiens! Pourquoi pas ? un bonbon à la menthe. Elle enfonça tout ça dans la poche de son jean, sauf le bonbon qu’elle déballa et enfourna dans sa bouche, balançant le papier directement à terre, au milieu d’un paquet d’autres trucs. Elle sortit finalement, lançant un dernier regard à l’épave qui dormait sur le sofa, et referme derrière elle. Dans le couloir, le néon au dessus sa tête grésillait légèrement. Encore un truc qu’elle devrait arranger elle-même parce que le propriétaire n’avait jamais l’air pressé de faire quoi que ce soit pour eux … Pas que ça la dérangeât réellement. Elle préférait ça plutôt que de l’avoir toujours dans ses pattes. D’ailleurs, seulement pour l’éviter, Meagan mettait un point d’honneur à lui remettre le loyer à temps … lorsqu’elle pouvait se le permettre, bien évidemment. C’était justement pour ça qu’elle sortait ce soir. Demain, elle devrait allonger l’argent qu’elle ne possédait pas, pour le moment. Il était tôt. Ça n’était pas l’heure idéale pour trouver des clients, mais elle avait envie de se débarrasser de ça le plus tôt possible. Dix-neuf heures … ça lui donnerait le temps de consommer un peu dans un bar, histoire de se mettre un peu plus dans l’ambiance et d’observer les éventuels prospects. Ça pouvait être bien, de les cibler avant qu’eux ne vous ciblent. Ça renversait le rapport.
Une chose était sûre : elle avait besoin de 400 balles pour le lendemain. Si elle était chanceuse, elle ferait plus et pourrait manger autre chose que des pâtes au fromage et des toasts pendant une semaine. Mais elle en doutait. Elle était consciente de ne pas valoir autant. Des prostituées, il y en avait des tas, et des bien plus jolies qu’elle. Le seul as qu’elle avait dans son jeu, c’était que contrairement à la plupart des filles du milieu, elle acceptait tout ce qui branchait ses clients. Même si c’était totalement immoral. Totalement dégoûtant. Totalement dégradant. Ça n’avait pas la moindre importance pour elle. Ouais, bon. 400 dollars et elle serait satisfaite.
Elle n’avait pas pris de veste et, mettant le pied dehors, elle en fut bien contente. L’air était lourd et moite en cette fin de journée. Le soleil, presque entièrement disparu, se faisait toujours bien sentir par contre. Elle regretta même d’avoir mis un t-shirt plutôt qu’un débardeur. Quelqu’un d’avisé aurait même pu dire que pour ce qu’elle allait faire, une jupe courte aurait été plus de circonstance qu’un jean, mais c’était le genre de détails dont la jeune femme se souciait comme d’une guigne. Ayant ridiculement perdu du poids dans les dernières semaines, elle se serait sentie plus ridicule qu’attractive dans une tenue plus légère. Elle préférait de loin lorsque son corps était plus rond. Elle aimait ses hanches lorsque celles-ci étaient réellement larges et charnues, et non pas pointues.
Elle marcha quelques coins de rue, ne sachant pas précisément à quel endroit elle allait entamer sa chasse. Elle passait en revue les différents bars et clubs du quartier, essayait de voir les endroits où elle avait le plus souvent réussi à faire mousser ses affaires. Elle passa devant plusieurs édifices sans même poser un regard sur la devanture, sachant d’avance si un endroit était bon ou mauvais. Un panneau attira finalement son attention. Le Nomingway. Elle avait souvenir d’y être allée avec son frère, quelques temps auparavant, pour la première fois. Elle n’avait pas ramené de boulot ce soir-là, mais elle avait bien évalué la clientèle. Oui. Là-dedans il y aurait forcément quelqu’un de prêt à payer. Et elle put constater dès les premières minutes qu’elle ne se trompait pas. Une fois que le doorman lui eut fait signe d’entrer, une fois qu’elle se fut assise au bar … Elle avait eu raison. Malgré sa tenue en apparence négligée et parfaitement banale, elle attira les regards, et les consommations. Probablement qu’elle n’aurait même pas à se servir des billets qu’elle avait amenés, au cas où. C’était la perruque. Ça lui donnait un air relativement sage qui détonnait de ce qui se trouvait dans le club. Ça et l’effigie de Mickey Mouse défraichi qui lui donnait un petit air d’enfance en perdition. Ça et le maquillage et son air fatigué qui pouvait donner l’impression qu’elle avait déjà consommé et était plus vulnérable. Ça faisait aussi partie de ses ruses.
Rapidement entourée de quelques hommes qui avaient l’air d’appartenir au milieu d’où elle était issue, un verre de whisky à la main, elle se prit à penser que ce boulot était vraiment le plus facile à mener. Il ne s’agissait pas seulement de faire le trottoir et de demander vulgairement à un homme s’il voulait de la compagnie. Non. C’était tout un art. Et souvent, c’était beaucoup plus efficace de faire comme si on n’était pas du milieu, de jouer la comédie. Les prix pouvaient alors être moussés une fois l’acte consommé. Le client avait l’impression d’être unique et se sentait d’autant plus généreux. C’est pourquoi après deux verres, alors qu’en temps normal elle pouvait en boire le triple sans même chanceler, Meagan commença à mimer les signes de l’ébriété, chancelant sur son banc, roulant des yeux, repoussant sans force les avances qui lui étaient faites. De loin, elle pouvait réellement donner l’impression d’une fille qui n’est pas à sa place dans ce genre d’endroits, qui a fait une grossière erreur en y entrant.
« Ok, les gars. » Sa voix était un peu chevrotante. « Je vais rentrer, moi. Merci pour les verres. »
Elle descendit en bas de son siège, faisant mine de chanceler, de se rattraper au blouson de cuir d’un des mecs. Elle eut un rire un peu vague, et s’éloigna en direction de la porte du bar. Dans le miroir de l’entrée, elle put constater que ça avait fonctionné : les types la suivaient. Dissimulant son sourire satisfait, elle s’engouffra dans la ruelle. À peine avait-elle fait trois pas à l’extérieur pour s’appuyer au mur qu’une grosse main attrapait son bras, la tirant rudement. Camouflé par ses cheveux qui lui retombaient sur le visage, son sourire s’élargit. Mais ce fut de courte durée.
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Sujet: Re: Quand le héros sauve la mauvaise Princesse Dim 3 Juil - 9:49
Spoiler:
C'est très bien, ne t'inquiètes pas ^^
Caleb regarda le fond de son verre, observa le liquide ambré dont la simple odeur lui fit tourner la tête. Il grimaça en songeant à toutes les histoires de drogues mises dans des verres de parfaits inconnus, puis soupira en buvant une gorgée. L'appréhension d'un quelconque effet se vit estompé par la détente directe qui naquit de cette simple gorgée d'alcool. Caleb avait dû oublier qu'il ne tenait pas l'alcool, pour avoir commandé un liquide aussi fort ; peut-être qu'inconsciemment il avait envie de se soûler, voilà tout.
Assit à sa table, l'heure semblait passer lentement, comme si son entourage était prit dans une tourmente de chewing-gum. Caleb eut un rire digne d'une dinde, et se sentit rougir légèrement sous les coup d'oeil désapprobateurs qui se posèrent sur lui. Il ne valait mieux pas se faire remarquer. Il fit osciller son verre dans sa main, regardant les reflets de la pâle lumière tamisée sur son whisky. Alors qu'il songeait à partir, la serveuse revint vers lui. Il leva les yeux et son attention se vit de nouveau attirée par la jeune femme, entourée de tous ces gros bras. L'inquiétude et l'angoisse dégrisèrent aussi bien Caleb qu'une douche froide. Il ne tenait vraiment pas l'alcool.
« Si tu veux, mon tout beau, je finis mon service à 2H, on pourrait aller boire un verre. »
Caleb fit à peine attention à elle ; la lueur d'intérêt dans ses prunelles lui disait qu'elle ne s'intéressait à lui que parce qu'il était différent de ceux qui traînaient ici ; il était sûrement sa seule chance de faire un mariage à peu près correct. Il se leva, manquant de renverser son verre ; tout en avançant vers la porte où la jeune fille avait disparue, il se demanda pourquoi elle et pas la serveuse ; il était avocat et assez humain pour vouloir sauver chaque personne qui le méritait. Avait-il assez de cruauté pour juger autrui plus digne de son sauvetage ? Il n'eut pas vraiment le temps de penser plus à ça ; la jeune femme, visiblement ivre, venait de se faire happer par sa main.
Caleb songea que ce serait la dernière fois qu'il buvait ; il la relâcha aussi brusquement qu'il l'avait attrapée, et baissa les yeux comme un chiot prit en faute. Il sentit plus qu'il ne vit la présence des trois hommes du bar ; l'odeur de cuir et d'alcool était si forte qu'elle manqua de le faire s'étouffer ; il toussa discrètement, mais à ses oreilles cela ressembla à un coup de tonnerre. Une main l'agrippa et lui fit faire volte-face. Ses cheveux se hérissèrent, mais son attitude changea du tout au tout ; de timide et réservé, son visage se crispa et il parut soudain légèrement plus dangereux, presque capable de faire peur. Hélas, comparé à l'ours face à lui, il ne pouvait pas gagner la parade d'intimidation.
« Un problème, ma poulette ? »postillonna t-il vers la jeune femme ; Caleb eut un frisson en sentant son haleine chargée d'effluves pestilentielles.
D'un coup d'épaule, il se dégagea de la poigne ; l'avocat sentit dans ses doigts le fourmillement familier et retint son pouvoir qui lui titillait les muscles. Non, pas ici ! Il ne devait pas utiliser ses capacités. Ces hommes n'avaient pas mérité qu'il utilisa ses capacités de mutant.
« On va s'occuper de Madame, blanc-bec. Hein les gars ? » ricana t-il avec force sous-entendus. Si gros, les sous-entendus que même Caleb, de nature plutôt prude, voire bouchée, compris exactement où il voulait en venir. Il se hérissa comme un chat en colère, et sur son visage, le seul signe visible de sa colère qui sourdait furent ses sourcils qui se fronçaient.
« Je ne crois pas. » déclara t-il froidement.
Une voix, en lui, sûrement sa conscience, s'exclama avec horreur qu'il n'avait rien à voir là-dedans, et qu'il y gagnerait au mieux quelques bleus. Au pire ? Sa vie, quant à voir comment ces hommes étaient compacts, carrés, musclés. Caleb soutint le regard de celui qui l'avait empoigné, et délaissa tous ses principes, recula d'un pas et prit de nouveau le bras de la jeune fille - il espère qu'elle ne ferait rien d'idiot, comme se soustraire à sa poigne, moins brusque que celle précédente. Il ne souhaitait pas du tout profiter d'elle, juste la mettre à l'abri. Un coup d'oeil lui fit mal à sa place : elle avait l'air jeune, perdue, ivre ; son tee-shirt, où Mickey Mousse trônait avec un air de souvenir lointain, était sale et troué à certains endroits.
« Elle est pour moi, mon cher » continua t-il, il se força à faire un clin d'oeil. Quiconque d'extérieur aurait vu ce clin d'oeil aurait sûrement fait un parallèle avec un tic nerveux ; Caleb se força à prendre un air détaché, ne réussit qu'à faire un rictus. Il n'y avait aucune logique dans l'esprit d'un homme alcoolisé, il allait l'apprendre à ses dépends. Les hommes face à lui étaient si imbibés qu'ils se contentèrent d'un rire gras et tonitruant, qui résonna fort, et qui attira les coups d'oeil de ceux restés dehors. Calb soupira intérieurement ; pourquoi n'était-il pas resté chez lui, non de non ? Il recula lentement, ne lâchant pas la jeune femme ; il attendit de voir les trois loubars détourner le dos, toujours en riant ; il lâcha enfin le bras de l'inconnue et inspira un grand coup. Tous ses muscles étaient contractés, et il eut du mal à se détendre un peu. Il fallait qu'il retourne dans le bar, pour payer son verre et inspecter les lieux pour voir si son témoin ne pouvait pas encore venir. Il n'y croyait plus franchement, il était déjà plus de 21h. Il se tourna vers l'inconnue et lui fit un pâle sourire. Elle semblait mal nourrie, à la lumière crue des néons du dehors. Il eut pitié d'elle.
« Ca va aller ? Ecoute, tu n'as pas de peur à te faire, je compte pas du tout ... Enfin tu vois. »
Il rougit brusquement, et détourna les yeux. Il remarqua les regards posés sur eux, regards curieux et scrutateurs. Il s'éloigna légèrement dans la ruelle, espérant qu'elle le suivrait ; il voulait savoir pourquoi elle avait atterrit ici, pourquoi elle n'était pas restée chez elle plutôt que de traîner dans des bars mal famés. Il lui aurait volontiers payé un dîner, si sa logique ne lui soufflait pas de rester au moins quelques minutes dehors avec elle. Si les loubars tombaient sur lui alors qu'il le croyait avec elle, ils risquaient de ne pas comprendre, du fond de leurs limbes alcoolisées. Il n'avait pas envie de faire la loi, que ce soit avec son pouvoir ou avec d'autres moyens encore moins appréciés. Il ne voulait pas se faire remarquer ; il sentit que c'était râpé mais de toute façon, le taux d'alcool était si élevé ici qu'il se doutait que quiconque demain matin se rappelle de l'avoir vu.
« Qu'est-ce que tu fichais là, hein ? Tes parents doivent se faire du souci pour toi ! » s'exclama t-il, légèrement énervé contre l'inconscience des jeunes. Ils ne savaient pas à quoi ils s'exposaient.
Il se demanda si il avait été un aimant à bêtises quand il avait été jeune ; il se souvint d'avoir été un adolescent plutôt rieur et fêtard, mais pas d'avoir outrepassé les limites imposées par son père. Non, il avait toujours été plutôt sage, comparé à certains. Tiraillé entre le plaisir d'avoir toujours été un garçon calme et la frustration de n'avoir jamais été plus que ça, il posa son regard sur la jeune femme. Il soupira, regrettant de ne pas avoir pris sa veste - encore une bonne raison de retourner dans le bar.
« T'as l'air sous-nourrie, prends-ca et attends-moi, je reviens. »
Il sortit de son pantalon un paquet de gâteaux, des cookies à la noix de pécan, et s'élança vers le bar avant qu'elle ait pu bouger ou dire quoi que ce soit. Il pénétra dans le lieu, enfumé et puant, et fronça le nez en cherchant sa place. Il avança par à-coups, et retrouva sa place ; jurant intérieurement, il finit son verre cul-sec - très mauvaise idée - et il prit sa veste. La gamine avait l'air d'avoir froid. Il se dégoûta un instant, on aurait presque dit un pervers ; il songea qu'il faisait cela pour son bien, et son inquiétude se mua en fierté. Le whisky lui tapait de nouveau sur la tête. Alors qu'il retournait vers la porte, en titubant difficilement, il sentit qu'on le poussait violemment ; il tomba sur la droite et se rattrapa au bar où il se cogna le coude, douloureusement.
« Elle est où, la minette ? » rugit son ami le loubard.
Bizarre comme l'alcool peut parfois vous donner une vision accrue des détails : il n'avait pas repéré à sa première inspection ces tatouages infectés qui sortaient de sous son tee-shirt sale et parcourait son cou ; ses oreilles étaient percées et criblées d'anneaux en tout genre. Son visage était mangé par une barbe crade, et ses yeux injectés de sang. Caleb se redressa tant bien que mal, son coude le lançant violemment. Il sentit l'attention de tous, autant ceux qui avaient encore une once de lucidité que ceux n'en ayant plus du tout, se poser sur eux comme une chape de plomb ; l'avocat toussa pitoyablement et finit de se relever. Que devait-il faire ? Il ne pouvait pas lui dire où elle était !
« J'en ai pas fini avec elle » dit-il en crânant, en jetant sa veste sur son épaule comme l'aurait fait un héros. Intérieurement, de telles paroles le faisaient presque vomir. Quelle honte qu'il profère de telles horreurs ! Il prit conscience d'être bourré, et en remercia prestement le ciel. Faits qu'il ne se souvienne de rien le lendemain !
Le loubard sembla ne pas apprécier et il se crispa ; Caleb vit son poing se lever, et ses jambes se tendirent, le campant sur ses positions. Il arrêterait le choc ou bien l'esquiverait ? Il avait du mal à réfléchir, dans son esprit embrumé. Il vit une silhouette - la serveuse, en fait, mais il ne le comprit pas tout de suite - se mettre entre lui et le coup, et empêcher qu'il se fasse littéralement déchirer la face. Il se sauva prestement, et retourna dans la ruelle. Il se cacha dans les ténèbres, essoufflé et la tête lui tournant. Il tourna la tête : où était la gamine ?
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Sujet: Re: Quand le héros sauve la mauvaise Princesse
Quand le héros sauve la mauvaise Princesse
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