Boris est loin de ce que l'on pourrait appeler une armoire à glace. Il mesure "seulement" 1 mètre 75 et sa musculature n'est pas de celles que l'on pourrait qualifier d'imposante, bien au contraire. Assez fin et élancé, c'est plutôt dans ses gestes, son assurance et son charisme qu'il évoque de la crainte. Pas vraiment ce que l'on s'attend à trouver comme gabarit pour un originaire de la Sibérie centrale. De plus, vestiges de sa vie dissolue, des nombreux tatouages apparaissent sur ses bras, son torse, son dos,... On peut en compter une quinzaine, autant de signes distinctifs, malheureusement... Mais il s'en moque, évidemment.

Ses yeux sont d'un brun sombre tout comme sa chevelure mi-longue et son bouc. Que dire d'autre de lui ? Des traits fins, le faisant paraître plus jeune qu'il ne l'est en réalité, comme si sa vie d'excès et ses longues années de prison n'avaient pu le marquer... Un style qui peut paraître assez négligé, mais qui est en fait parfaitement étudié. Enfin, ici n'est pas le lieu pour détailler l'étendue de sa garde-robe, d'autant que ces dernières années c'est surtout les tenues réglementaires du pénitencier d'Achaea qu'il portait sur le dos...

Depuis toujours, Boris est doté d'un charme certain et il sait s'en servir. Cela l'a d'ailleurs souvent servi pour se procurer les ressources nécessaires à ses goûts pour la débauche, manipulateur et profiteur qu'il est. Drogues, alcool, jeux d'argent, voilà certains de ses plaisirs jusqu'à son emprisonnement.

Cependant, il est aussi doté de dons artistiques assez poussés et étendus. Non seulement dans le milieu de la musique où il joue notamment du piano et de la guitare avec une certaine aisance bien que loin encore du virtuose, il dessine et peint également, en plus d'écrire avec une plume affirmée.

Toutefois, son comportement est également fortement marqué par ses emportements colériques qui peuvent se montrer particulièrement violent. En effet, il n'a jamais hésité à jouer des poings, et son petit gabarit n'empêche pas qu'il est un excellent bagarreur, foutant régulièrement des raclées à plus grands et larges que lui. De quoi protéger les arrières d'un homme à l'agressivité exacerbée et à la mauvaise humeur plus que courante. C'est un esprit libre qui ne tolère pas que l'on puisse vouloir exercer une pression sur lui. Expliquant d'ailleurs sa tendance à fuir toutes responsabilités, voilà une autre raison pour laquelle jamais il ne pourra être un mari aimant et un père exemplaire.

Il a tout simplement mieux à faire : travailler pour son propre compte et profiter un maximum ! D'un naturel paranoïaque cependant, il n'est pas prompt à faire usage de ses pouvoirs afin de ne pas faire savoir son statut de mutant, de même qu'il ne tolère pas qu'on puisse le toucher, sachant à quoi s'attendre de la part de certains mutants dont le contact peut être fatal. Un solitaire qui ne se lie que dans son propre intérêt, à l'exception de sa fille, le seul être vivant pour qui il éprouve des sentiments sincères. En gros, tous ceux qui ne sont pas avec lui sont contre lui, c'est aussi simple que ça...

Dans le registre de ses particularités, notons tout d'abord ses nombreux tatouages. Une quinzaine environ, dont la majorité lui avaient été fait avant son arrivée en prison. On y trouve le nom de sa fille notamment, mais aussi quelques dessins et symboles qui ne semblent pas particulièrement liés entre eux. Ses bras, son torse, son dos, et ses mollets même, il en compte un peu partout, même s'ils ont tous une taille relativement modeste. Pas de grande fresque contenant le plan pour s'échapper de sa prison, non non, il a plus de goût que cela tout de même.

Il est un gros fumeur, une manie dont il ne peut se départir depuis longtemps, ses préférences allant pour les cigarettes qu'il roule lui-même en se servant de feuilles de tabac plutôt que de papier.

A-t-il des rêves autres que mener sa vie comme il l'entend ? Des peurs autres que ce qui l'empêcherait de se réaliser pleinement ? Difficile à dire, il n'en a en tout cas jamais rien montré à personne...

Pourquoi Boris est-il à considérer comme un mutant hostile ? Et bien, c'est très simple... Se rendant très jeune compte de ses pouvoirs et de la différence que cela impliquait entre lui et les autres, cela lui fit une fameuse revanche sur sa petite enfance difficile. Grandir dans un orphelinat lorsque vous êtes le plus petit et le moins sportif de tous, cela n'a rien de facile, les enfants sont si cruels...

Depuis, les humains ne sont plus pour lui que des pantins dont on peut au mieux se servir, au pire se débarrasser. Son expérience de la vie et les différentes persécutions qu'il a pu observer n'ont eu de cesse de lui faire mépriser de plus en plus les simples humains, dont il estimait clairement pouvoir disposer à sa guise.

Et sa vision des mutants ? Pas bien plus réjouissante... Entre les pacifistes qu'il exècre à l'en faire vomir, les faibles qui préfèrent ne pas prendre parti et les belliqueux qui sous prétexte de faire entendre leur cause perpètrent des crimes raciaux comparables à ceux des humains, voilà rien qui ne puisse réellement l'attirer.

Ces derniers cependant sont les moins désagréables à ses yeux, usant finalement des mêmes méthodes que celles qu'il désirait faire primer. Un bon humain était un humain mort. La grande différence entre les hommes de Chow et lui est simplement que Boris n'a besoin de plaider aucune cause pour ce faire, prenant juste plaisir à voir ces pauvres parasites hurler de douleur et périr...

C'est le premier pouvoir qui lui est apparu, tout jeune encore. Pendant longtemps, ce pouvoir s'est limité à pouvoir traverser les matières organiques, c'est-à-dire venant de matières vivants, comme le bois ou le cuir. Non seulement il est capable d'user de ce don de "passe-muraille", mais l'effet inverse est également vrai : s'il se concentre au moment de recevoir un impact d'un objet fait de l'une de ces matières, il peut les faire littéralement passer à travers lui comme s'il n'était rien d'autre qu'une masse fantomatique. Cependant, ce pouvoir a pu évoluer au cours de ses presque vingt années d'incarcération.

En effet, s'exerçant chaque jour de manière très discrète, il est parvenu à développer son don à d'autres matières, bien d'autres matières. Il n'est en effet désormais plus limité aux matières vivantes. Mur de béton, barreaux de fer, vitre et plastique... Plus aucune cellule ne peut désormais le retenir prisonnier. Les coups donnés, quelque soit la matière, peuvent donc aussi être de la sorte évités, si tant est qu'il est capable de les voir arriver et de concentrer son pouvoir à temps.

Évolution #1 : Le mutant est déjà capable d'appliquer son intangibilité aux petits objets en contact avec lui (sinon il se retrouverait à poil à chaque fois qu'il utilise son pouvoir, ce qui est admettons le quelque peu gênant). L'amélioration de son pouvoir lui permettrait d'appliquer cela aux objets plus volumineux (un véhicule par exemple) ou à d'autres personnes. Bien entendu, cela lui demande une plus grande dépense d'énergie lorsque son pouvoir s'applique à d'autres êtres vivants et aux objets de grande taille.

Là où l'intangibilité est un pouvoir plutôt défensif, Boris n'est pas non plus dépourvu de capacités offensives. En effet, il est de ceux ayant la chance d'être né avec deux pouvoirs et non un seul et unique. La bio-kinésie, son deuxième atout, consiste en le fait de pouvoir charger n'importe quel objet d'énergie cinétique, provoquant alors la déflagration du-dit objet au moindre choc notable.

Il ne faut donc pas s'étonner qu'il se trouve toujours les poches pleines de petits objets, souvent en rapport avec son vice du jeu : pièces de monnaie, jetons de casino, dés, boules de roulette,... Des cartes parfois, mais aussi de petits bonbons, sucettes, sans compter ses cigarettes. Autant d'armes potentielles entre les mains d'un tel mutant. À noter qu'il n'est pas obligatoire qu'il y ait un choc pour provoquer l'explosion d'un objet chargé. Un claquement de doigt du Russe peut suffire s'il n'est pas trop éloigné...

Boris Nicolaï Aleksandr Zakharine, tel est le nom de cet enfant. Du moins c'est ce qui fut noté en les registres du petit orphelinat au sein duquel il a grandi. Né de parents inconnus, il s'est alors toujours demandé qui avait bien pu lui affecter ces noms, si l'on n'était pas capable de retracer l'origine de ses parents. Leur nom, il n'en a jamais rien su, pas plus que leur visage ou la moindre information sur ce qu'ils étaient ou avaient pu être. Rien... Peut-être que son père n'était rien d'autre qu'un des mineurs de diamants de cette "bonne" ville de Mirny. Deux énormes mines à ciel ouvert, ainsi que des bâtisses désormais dépéries suite à l'épuisement du gisement. Il n'y avait plus ici que pauvreté et froid désormais. Tous n'ont pas les mêmes chances à la naissance, c'est indéniable... Son seul problème à lui, c'était qu'il ne pouvait mesurer pleinement la sienne. Pas encore. Pas facile à considérer en même temps lorsque l'on est le plus petit et le moins sportif... Pourtant, il put se faire un ami. Vladimir, ou bien Vassili... Il ne s'en souvenait plus vraiment, malgré l'importance qu'il eut pour lui ! Le seul enfant ne le déconsidérant pas totalement, et prenant même le temps, parfois, de l'aider à progresser dans le jeu le plus fréquent des orphelins : le football. Boris n'aimait pas réellement ce sport, mais pour se faire accepter, pour ne plus être le dernier choisi lors de la composition des équipes... Ce jour-là, il n'avait que cinq ans, six bientôt...

Non Boris, tu n'y es pas ! Si tu penses juste à frapper la balle, ça n'ira jamais, ça ne fera que la faire partir n'importe où. Tu dois donner une direction ! Imagine que l'endroit d'impact n'est pas là où ton pied touche la balle, mais à travers elle, comme si tu devais la transpercer, et ainsi accompagner le mouvement pour l'envoyer là où tu veux. On réessaye !
Mais... Je n'y arrive pas ! Je n'aime pas ça, je n'y arriverai jamais !
Cesse de pleurnicher ! En t'exerçant, on finira pas y arriver. On réessaye !

C'était facile à dire pour lui. Il avait huit ans déjà, et n'était pas le plus mauvais, se montrant plutôt comme un défenseur rugueux mais efficace. Boris quant à lui, même s'il apprenait à frapper correctement le ballon... À quoi ça pourrait le mener ? Le moindre coup d'épaule et il se retrouvait par terre, provoquant ensuite bagarre sous le coup de la frustration... Et même là il était battu, trop faible encore que pour faire face. Mais grâce à la motivation et aux conseils de son ami, un jour peut-être... Pour lui, il se devait d'essayer. De se concentrer et d'essayer vraiment. Ainsi, lorsque Vassili/Vladimir lui envoya la balle, il ressassa aussi fort qu'il pouvait dans son esprit les conseils qu'il venait de lui donner. "Frapper au travers de la balle"... Un échec total ! Frappant carrément à côté, il s'écroula de tout son long. Enfin... est-ce que ça c'était réellement passé comme ça ? Une sensation étrange dans son pied. Et un regard plus étrange encore de la part de son ami...

Encore raté ! Je te l'avais dit, je n'arriverai jamais à rien !
Je... n... tu... Tu...
Qu'est-ce que tu as ? Ne fais pas cette tête, ce n'est pas drôle !
Mu... Mutant ! Un mutant !

Vassili/Vladimir partit alors à reculons après être tombé sur son séant face au choc de ce qu'il venait de voir. Le pied du petit Boris n'était pas passé à côté, non. En fait, il avait réussi, bien plus qu'il ne pouvait l'imaginer. Passer au travers... Il n'aurait pu mieux le réaliser en vérité, même s'il n'en avait pas encore conscience. Mais l'attitude de son ami ne pouvait que l'énerver, aussi ne pouvait-il pas comprendre. Tenant le ballon entre ses mains, trouvant que l'humour de Vladimir/Vassili était tout sauf amusant, sa rage grandissait... Puis son partenaire de jeu se leva à la hâte, pour prendre ses jambes à son cou et détaler. D'un mouvement de rage, le Zakharine frappa la balle dans sa direction, ne pensant plus du tout au conseil donné mais juste à la frappe, pure et dure. Un magnifique tir, pour la première fois de sa vie. Puissant et précis... Et lorsque la sphère de cuir heurta le dos de Vladimir - à bien y repenser, oui, ça devait être Vladimir - le résultat ne fut une fois de plus pas celui escompté. Un grand "boum", puis plus rien... Plus rien que son ami agonisant, n'ayant plus qu'une plaie sanguinolente à la place du dos...

Aucun d'eux n'était revenu à l'orphelinat, bien entendu. Boris ne sut jamais ce qu'il était advenu de la dépouille de Vladimir, ayant fui aussi vite que possible sans prendre la peine de prévenir qui que ce soit. Ce fut finalement affamé et à bout de force qu'il arriva à Lensk, où sans la gentillesse d'une veuve âgée il serait sans doute plus qu'une petite dépouille sous une croix anonyme.


Son secret gardé - les morts ne parlent pas - il put fonder une nouvelle vie ici. La vieille femme avait fini par le recueillir, comprenant qu'il n'avait nulle part d'autre où aller. Et malgré le caractère froid du jeune garçon, elle ne pouvait s'empêcher de lui donner tout l'amour dont elle était capable, se privant bien souvent du peu qu'elle avait pour le lui offrir. Mais malgré tout, Boris implacablement restait distant... Quelque part, il se disait qu'elle ne pouvait pas réellement l'aimer. Pas pour ce qu'il était réellement du moins. Vladimir avait été son seul ami, mais dès qu'il avait constaté qu'il n'était pas comme tout le monde, qu'il possédait ce fameux gêne qui effrayait les masses, son regard avait changé. Lorsque vous voyez la peur dans le regard de la seule personne qui vous est chère et que vous l'abattez sans plus laisser aucune chance à la discussion ou au pardon, vous ne voyez plus la vie de la même façon, c'est évident. Il en serait de même pour elle. Il suffirait qu'il lui montre de quoi il était capable, et elle le rejetterait à son tour, ça ne faisait pas de doute pour lui. Aussi prit-il la décision de ne plus jamais s'attacher, à personne...

Ainsi s'écoulèrent quelques années de sa vie. Ainsi s'écoula une partie de sa scolarité. Cette dernière était un échec. S'il savait parfaitement lire, écrire et compter, il était un cancre confirmé ! Ne travaillant pas ses leçons, il fut rapidement évident que ce ne serait pas via ses études qu'il pourrait un jouer briller. Il le savait... Il avait d'autres facultés sur lesquelles il pourrait se reposer, et qu'il tentait de développer en secret, loin de la ville. L'orphelin, outre ses capacités mutantes, avait également bien travaillé son jeu de jambe et la force de ses poings. Lorsqu'il se battait - et cela arrivait souvent - c'était habité d'une hargne sans pareille qu'aucun enfant de son âge ne pouvait égaler. Mais avec un comportement pareil que ses notes médiocres ne rattrapaient pas, ce qui devait arriver arriva, et l'école le renvoya... Seize ans, et encore rejeté... Il s'en moquait ! Un jour, il leur montrerait à tous ce qu'il valait réellement. Un jour, ces pitoyables humains verraient son pouvoir et constateraient qu'ils n'avaient plus qu'une seule solution : s'agenouiller devant sa suprématie. Voilà de quoi étaient fait ses rêves d'adolescents, quand d'autres désiraient une belle carrière, une femme et des enfants...

Mais il n'en fut rien. Et comme les autres, il se trouva une femme... Plus par nécessité que par choix. La pauvre veuve avait fini par perdre la vie dans son sommeil. Elle l'avait aimé jusqu'au bout, mais il ne la pleura pas, pas la moindre larme. Devant se trouver un autre moyen de subsister, c'est avec son charme qu'il avait pris dans ses filets une jeune femme aisée, de quelques années son aînée. Et à dix-huit ans à peine, il épousa la gentille Chervanska, la pauvre devant rapidement déchanter. Le comportement de Boris ne fut en effet plus le même une fois que le mariage fut prononcé. Il partait souvent dans des virées où il dilapidait l'héritage de son épouse. Une certaine fortune, en effet, mais bien loin d'être assez colossale que pour pouvoir soutenir son rythme. C'est à cette époque qu'il développa son goût prononcé pour de multiples vices, et il était bien rare qu'il fut sobre à cette époque. Mais malgré leurs différences et leurs disputes où le jeune homme n'hésitait pas à battre son épouse, une envie commune les habitait : celle de voir un jour leur union couronnée d'un doux fruit, d'un enfant de leur sang. Chervanska pensait que cela pourrait attendrir son époux, qu'il changerait alors, que pensait à leur enfant il cesserait ses virées coûteuses et nocives.

Et ainsi, deux ans plus tard vint au monde Nikita. Il avait les cheveux blonds de sa mère. Et pas que cela, il était clair qu'il tenait beaucoup plus d'elle que de lui. L'effet cependant ne fut pas celui escompté... Car s'il était évident à son regard qu'il était heureux d'avoir engendré, une ombre venait le ronger. Est-ce qu'il désirait réellement élever un enfant dans ce monde pourri ? Entouré de ces humains insignifiants ? C'était une erreur... Il l'avait désiré ce fils, mais ce n'était autre qu'une erreur... Perdu, il préféra fuir quelques temps...


Moscou. La première fois qu'il y mettait les pieds. Et là, il put "profiter de la vie" plus qu'il ne l'eut jamais fait, si tant est que l'on puisse considérer cela comme profiter. Il ne cessait de boire que pour fumer ou jouer, atteignant des dépenses trop importantes pour le peu d'argent qu'il restait au patrimoine de son épouse. Mais qu'importe, au moins pouvait-il s'évader, éviter de penser à la destruction qu'il pourrait engendrer s'il se permettait enfin de laisser son pouvoir librement s'exprimer. Et alors qu'il touchait le fond, sans plus un sou et se mettant peu à peu en tête qu'il était certainement temps de rentrer avant de dépérir loin de sa famille, il fit une rencontre qui allait lui offrir d'autres opportunités. Une blonde magnifique, américaine, cela s'entendait à son accent succulent. Elle parlait pourtant le russe avec une certaine habileté, et tout chez elle évoqua le ravissement pour Boris. Pour la première fois de sa vie et peut-être la dernière, il tomba amoureux. Parvint à s'en rapprocher et à voir qu'elle partageait bien des penchants avec lui... Et d'autres choses encore... Car si elle ne l'avait pas repoussé, lui qui n'avait plus l'air de grand chose, ce n'était que pour un seul détail dont elle lui fit part sur une phrase énigmatique : "ton aura... Elle est d'un rouge sombre si puissant et viril... elle me rend folle !"

Une mutante, elle aussi. Au pouvoir passif que de percevoir les autres de sa race en une aura colorée autour d'eux. Elle, elle pourrait le comprendre. Elle, elle pourrait savoir et l'aimer tout de même, pour ce qu'il était vraiment. Et jusqu'à ce que son voyage d'affaire ne se termina, ils purent s'aimer, d'une manière surtout charnelle, presque bestiale. Lorsqu'elle repartit pour son pays, elle lui laissa de quoi rentrer chez lui... ainsi qu'assez pour pouvoir la rejoindre aux Etats-Unis lorsqu'il se sentirait prêt. Boris était bien désireux de tout quitter dès à présent, oublier sa femme et son fils et partir avec elle, là, tout de suite. Mais elle ne lui en donna pas la permission, exigeant de lui qu'il fasse au moins ses adieux. De plus, elle désirait prendre le temps de préparer son arrivée... Aussi se plia-t-il à son ordre, amoureux qu'il était.

Son retour à Lensk ne fut pas un grand moment de joie et de bonne humeur. Totalement ivre ce soir là, il "grimpa" sa femme avec une certaine violence sans que celle-ci ne puisse rien y faire. Elle ne le désirait plus, ne voulait plus qu'il la touche, mais Boris faisait ce qu'il avait envie de faire, comme toujours... Cela ne pouvait en aucun cas être taxé d'amour, juste un coït brutal sans le consentement de la pauvre Chervanska. Il ne la toucha plus jamais ensuite, comme si le fait qu'elle fut violée l'avait salie, alors qu'il en était lui-même l'auteur. Rien qu'une humaine, faible et méprisable... Trois mois... C'est le temps qu'il passa encore en sa demeure. Trois mois, assez que pour deviner un ventre s'arrondissant. Pouvait-on encore appeler cela un "heureux évènement" dans de pareilles conditions ? "Tu le nommeras Piotr". Les derniers mots qu'il lui accorda avant de prendre la porte à jamais. Et si c'était une fille ? Cela ne pouvait être. Ce serait un garçon, quelque part, il en avait la certitude. Tout comme Nikita qu'il abandonnait sans honte. À demi humain, il avait autant d'intérêt que sa génitrice. Ce fut la dernière fois que les pieds de Boris Zakharine foulèrent le sol de Russie...


Á vingt-et-un ans, il arrive à Las Vegas. Il ne parle pas encore l'anglais à l'époque, mais il apprendra vite auprès de son professeur particulier, sa magnifique blonde qu'il épouse illégalement dans une chapelle par un prêtre déguisé en venusien - selon ses propres mots - lors d'une soirée particulièrement arrosée. Loin d'être le cadre le plus romantique qu'ils purent trouver, certes, mais cela ne semblait avoir aucune importance à leurs yeux. Tout ce qui leur importait était d'être ensemble et ils avaient bien l'intention d'en profiter un maximum. De plus, il fallait croire que la graine du Boris était particulièrement féconde, car il ne fallut que peu de temps avant qu'à son tour cette deuxième épouse ne tombe enceinte, au milieu de la débauche dans laquelle ils vivaient... Les discussions quant au possible prénom de l'enfant à venir l'intéressèrent pour une fois. Enfin, disons plutôt que pour une fois il y eut discussion, là où auparavant il n'avait pas réellement laissé le choix à sa première épouse. Et lorsque finalement ils furent fixés sur le sexe, le nom de l'enfant à naître était déjà choisi : Nastasya Heater Zakharine.

Leur statut de mutant les empêchèrent cependant d'avoir recours aux hôpitaux en ce fameux quatorze août, car il était à peu près sûr que leur fille profiterait du même gêne qu'eux. Aussi, le jour J, ce fut en leur domicile de Las Vegas qu'un médecin seul, Boris lui servant d'infirmier, aida à mettre au monde leur merveilleuse enfant. Ses parents l'aimèrent profondément, dès le premier regard, cette chère enfant née d'une amour fusionnel et fait de passion. Mais tout aurait alors été trop beau, n'est-ce pas ? Alors que cette naissance aurait pu être un pas vers la rédemption, le Zakharine n'eut pas cette chance... Seul un hôpital aurait pu gérer les complications qui frappèrent la nouvelle maman dont le dernier souffle vint alors que larmes aux yeux elle contemplait sa fille... Un nouveau drame qui ne laisserait pas Boris indemne... Sans doute aurait-il disparu, parti loin pour enterrer sa peine, s'il n'avait pas eu un précieux joyaux dont s'occuper. Il n'était pas homme à assumer, mais ici, c'était différent. Tout ce qu'il lui avait été légué par cette femme qu'il avait tant aimé... Cette petite Stasie, il jura qu'elle ne manquerait jamais de rien !


Le russe s'appliqua tant à la maîtrise de l'anglais que bientôt, son accent bien que perceptible ne fut plus du tout dérangeant. Cependant, il n'en profita pas pour se trouver un honnête métier... Il fallait des diplômes pour cela, des compétences, et surtout l'envie et l'acceptation de recevoir des ordres d'un patron, ce pour quoi il n'était clairement pas fait. Non, Boris Zakharine serait son propre employeur, cela allait de soi. Et ses activités ne furent pas... des plus légales et honnêtes, dirons-nous ! Son charisme et sa grande gueule lui permirent de rapidement se trouver quelques hommes de main afin de lancer son business. Il était devenu un commerçant en quelques sortes. Achat-vente, d'un peu tout ce que vous pouviez désirer dans le domaine de l'illégal. Un peu mercenaire aussi, il n'était pas contre le fait de remplir quelques contrats. Et enfin, on le respectait réellement ! Chose pas très difficile à comprendre lorsque l'on sait que tous ceux qui se sont opposés à lui ont fini leurs jours dans une petite explosion... Mais jamais aucune preuve ne put le lier à aucun de ces meurtres. Et bientôt il se murmura qu'a la solde de Boris travaillait un fantôme, capable de s'approcher sans mal de ses proies pour les abattre sans qu'aucune trace d'explosif ne puisse ensuite être retrouvée. Du travail de pro ! Ah, s'ils savaient qui en était réellement l'auteur... Certains purent le comprendre cela dit... L'amenant à sa première rencontre avec Chow.

Le japonais était un malin... Il suffisait de croiser son regard pour le savoir. Lui, il ne s'était pas simplement fié aux rumeurs, et comprenait que si Boris s'était si rapidement fait une place au sein des gangs locaux, ce n'était pas pour rien... Lui, il avait compris que Boris était un mutant particulièrement puissant, chanceux de posséder non pas un mais deux pouvoirs. Cependant, le russe n'était pas prêt à accepter la proposition qui lui a été faite, celle de rejoindre les forces de Chow dans la lutte qu'il menait. Ce serait par trop s'exposer. Il ne pouvait se le permettre, pour Stasie, ainsi que dans une bien moindre mesure pour Nikita dont il avait retrouvé la trace à Moscou et à qui il avait déjà pu rendre visite, même si cela restait très rare. Chow laissa sa carte, sans pourtant que Boris y montre le moindre intérêt. Le russe était un indépendant solitaire, ainsi soit-il, donc...


Ainsi se poursuivit la vie dissolue de Boris Zakharine. Noyé dans l'alcool et grand consommateur de drogues, comme depuis si longtemps, et possédant de plus un caractère emporté comme le sien, cela ne pouvait pas durer bien longtemps avant qu'il ne commette un impair... Comme cela fut le cas ce jour, dans ce magasin de musique... Laissant son "petit sucre d'orge" à la maison, il avait eu l'envie d'aller s'acheter une nouvelle guitare ! Son gout pour la musique a été développé depuis son enfance, lorsqu'avec sa "mère adoptive" il avait appris le piano. Sans demander l'avis de quiconque, il avait saisi une acoustique dans le rayonnage et s'était mis à jouer. À l'oreille il était évident qu'il savait y faire, pas la moindre fausse note... Le vendeur cependant ne put s'empêcher que de le regarder de travers, ce qui déjà ne plut réellement pas à Boris. Mais il n'en avait cure, se plaisant juste à jouer un air plus violent alors, entraînant cependant même si joué un peu trop fort. Et lorsque le vendeur s'avança vers lui, en bon provocateur qu'il était, il s'amusa à se prendre pour une véritable rock star, fracassant l'instrument au sol comme s'il avait été réellement trop emballé par le rythme. La goutte qui fit déborder le vase, lorsque le vendeur lui saisit fermement l'épaule en l'insultant. Ce qu'il ignorait c'était que...

Personne... PERSONNE ne touche Boris !!!

Les restes de la guitare servirent à tabasser violemment le malheureux qui n'avait voulu faire que son travail. Et pendant que Boris terminait son passage à tabac en passant les cordes de l'instrument autour du coup du vendeur et tirait avec force pour l'étrangler, le russe se justifiait en hurlant...

J'allais te la payer ta guitare ! Ah ! Ahah ! T'es fier de toi maintenant, hein ? Petit malin va ! J'allais te la payer ! Et maintenant, c'est toi qui va me le payer ! Ahahah !

Difficile de plaider l'innocence... Aussi tenta-t-il de plaider la folie, alors qu'en attendant son procès il fut incarcéré en le pénitentiaire d'Achaea, Comté de Clark, Nevada. Là, son gêne mutant fut découvert, mais bien mal identifié. Seul l'un de ses pouvoirs fut dépisté : son intangibilité, cette capacité à traverser les matières organiques, comme il l'avait prouvé lorsque le poing d'un agent de sécurité n'avait fait que traverser sa tête d'une tempe à l'autre, provoquant l'hilarité du russe. Ce qui le faisait moins rire, c'était qu'il laissait dehors une petite fille de quatre ans, son plus précieux trésor... La garde en fut confiée selon son désir à des amis aux finances larges et irréprochables, afin que toujours elle ne manque de rien. Et c'est ainsi que débutèrent les longues années de son jugement...

Plaidant la folie, puis l'innocence contre l'avis de son premier avocat, en revenant à la folie avec son second représentant... Il y en eu quelques uns d'ailleurs, Boris en venant souvent à de violentes disputes avec les magistrats, qu'ils soient là pour le représenter ou non. Ce petit manège fit durer le jugement bien plus que de nécessaire, alors qu'il était évident pour tous que cet immigré ne reverrait jamais la liberté, que ce soit l'asile, la perpétuité ou la peine capitale. Pour beaucoup, il était tellement évident que ce serait finalement le couloir de la mort que l'on ne vit pas la nécessité de le puçer avant de ne pas commettre de dépense inutile... ou bien était-ce grâce à ses relations qu'il avait su faire jouer ? Car malgré tout, il restait Boris Zakharine, et selon la rumeur, si lui était en prison, son assassin fantôme était lui toujours en liberté.

Finalement, après un procès s'étalant sur plus d'une dizaine d'années, une peine fut donnée : perpétuité ! Un appel fut lancé, mais entre temps, d'autres charges tomberaient sur le russe qui ne s'était pas résolu à adopter un comportement parfaitement irréprochable en prison, loin de là...


Cela fait aujourd'hui dix-neuf longues années que Boris se trouve en prison. Il reçoit toujours quelques visites au parloir, principalement sa fille, et dernièrement parfois même son aîné, ayant lui aussi quitté la Russie. Chow de temps en temps s'assure également que Zakharine ne perd pas espoir. Ce n'est pas du tout le cas, en fait. Ces années, il les a mis à profit... Seul dans sa cellule - son comportement empêchant que l'on enferme quiconque avec lui - il avait peu à peu travaillé son pouvoir, cherché à le développer. L'homme n'était plus limité aux seules matières vivantes ou qui le furent du moins. Mais ce secret, il le garda précieusement. Il n'a cessé de développer ses plans, préparant depuis quelques années déjà ce qui suivrait son évasion, via Stasie ainsi que dans une moindre mesure Chow. Depuis quelques mois, étrangement, quelques boutons disparaissaient parfois de ses tenues, lui provoquant même un sévère passage à tabac lorsqu'un garde lui avait demandé ce qu'il pouvait bien en faire.

Je me les suis mis au cul... Tu veux que je te montre ?

Avait-il répondu tout en se retournant et baissant son pantalon... Cette attitude provocante était habituelle pour les gardiens, et ils se plaisaient et le lui faire payer. Après tout, pour eux, il n'était qu'un mutant au faible pouvoir, ne lui permettant même pas de s'échapper... Il ne pouvait même pas éviter les coups de matraque, c'est pour dire ! Ah, ces idiots d'humains, s'ils savaient... Cependant, un nouveau jugement eut lieu, bien plus expéditif celui-là que le précédent. Pour le meurtre d'un co-détenu, la peine de Boris fut muée en peine de mort, ses relations s'étaient faites trop ténues pour qu'il puisse l'éviter. Mais il ne le désirait pas réellement, en vérité. Peu importe... il serait bientôt dehors !


Deux semaines depuis la nouvelle sentence. Deux semaines qu'il se trouvait dans le couloir de la mort. Assis au sol contre un mur, il se disait qu'il était réellement devenu totalement fou, n'ayant plus prononcé le moindre mot depuis. Personne n'était venu le voir au parloir, comme si ses proches faisaient déjà son deuil de lui... C'était à sa demande en vérité, car ceux dehors qui comptaient pour lui savaient que la peine ne serait jamais donnée. Boris savait exactement comment il allait s'en sortir, et bien que cela soit particulièrement risqué, personne ne doutait de lui quant à ses aptitudes à mener son plan à bien.

Alors, le ruskov ! Ahah, tu sais quel jour on est aujourd'hui ?
Hum... c'est mon anniversaire ?
Tiens, tu as retrouvé ta langue ? Enfin, pas d'importance. Non, ce n'est pas ton anniversaire, crevure de mutant ! Mieux, beaucoup mieux que ça ! Aujourd'hui, on te gaze !
J'aurai quand même droit à mon gâteau ?

En effet, il y eut droit ! Un bon moelleux au chocolat garni de morceaux de banane, sa pâtisserie préférée ! Mais il ne la termina même pas... Lorsque le garde revint auprès de lui avec un prêtre pour une dernière confession, la cellule de Boris ne comptait plus de prisonnier... Pas le temps de se retourner qu'un petit bouton de chemise heurta le crâne du geôlier, provoquant explosion, fracas et éparpillement de cervelle...

En quelques minutes, la prison était devenu un champ de bataille dans lequel les forces de l'ordre étaient clairement en sous-effectif. Quelques portes passées sans qu'il fut la peine de les ouvrir, quelques explosions frappant les gardiens avant qu'ils ne puissent agir... Le stratagème était rôdé ! Les cellules furent ouvertes, Boris s'extasiant alors et exhortant ses co-détenus à sortir et récupérer leur liberté ! Une véritable émeute ! Une armée qui ferait une parfaite diversion à l'évasion du russe qui ne manquerait pas de trouver parmi eux les bases de sa nouvelle organisation. Car il comptait bien reprendre les affaires maintenant que l'air libre pouvait à nouveau flatter son visage. En effet, comment retenir un homme qu'aucune cage ne pouvait plus maintenir captif ? Qui plus est lorsque des centaines d'autres hommes dangereux et surexcités l'accompagnait ! Tous se battaient pour leur propre liberté, et quelques uns d'entre eux périrent par les balles tirées dans la masse. Mais une dizaine d'entre eux suivirent Boris jusqu'à l'air libre, pendant que le reste des taulards servirait de distraction aux forces de l'ordre, trop peu nombreuses que pour pouvoir tous les retenir. Tout s'était si vite, tellement soudain... Lorsque les renforts arriveraient, Boris se serait déjà rangé auprès de puissants alliés...

Et désormais, cette société putride allait payer. Payer pour ces années d'enfermement loin de sa fille. Payer pour n'être que des faibles, des insectes purulents. À partir de maintenant, ses méthodes allaient radicalement changer... À partir de maintenant, son nom serait synonyme de chaos...